2. - LES BASCULES DE SCHMITT
2. 1. - DÉFINITION
ET FONCTION
Une transition d'un niveau logique L
à un niveau logique H, appliquée à
l'entrée d'un inverseur, peut être schématisée comme indiqué à la figure
28.
Schématisé
ainsi, il apparaît que les signaux présents à l'entrée et à la sortie de
l'inverseur présentent des fronts bien droits, c'est-à-dire que la tension
varie instantanément d'un état logique à l'état logique complémentaire. Or,
ceci est une vision purement théorique. Les signaux réels s'éloignent de
cette représentation théorique et appliqués au même circuit logique,
auraient la forme représentée à la figure 29. Il
apparaît donc qu'un signal logique met un certain temps (ici t2
- t1) pour passer d'un état logique à un autre. Une
deuxième remarque s'impose. Si l'on se réfère à la figure 30-a, il apparaît
que la tension présente des variations dues aux parasites ou aux «bruits». Ces
derniers sont définis comme des perturbations ou des variations de tension à
petite échelle sur un signal électrique. Un
buffer peut être défini comme un amplificateur de courant, c'est-à-dire un
circuit conservant la forme du signal et augmentant la puissance disponible à
sa sortie. Ce buffer présente, par exemple, un seuil de
basculement égal à Vcc / 2, comme
représenté à la figure 30-a. Or, le signal d'entrée possède des
perturbations. En sortie, le signal logique n'est donc pas stable mais présente
des oscillations comme représenté à la figure 30-b. En effet,
les oscillations indésirables à l'entrée franchissent à plusieurs reprises
le seuil de basculement du buffer. Il a donc été nécessaire de
concevoir des circuits logiques qui puissent palier ces deux types
d'inconvénients. Ce sont les bascules
de Schmitt ou encore triggers de Schmitt.
L'idée fondamentale est de créer deux seuils de basculement, l'un sur le front
montant d'un signal, l'autre sur le front descendant de ce signal. Ceci est
représenté à la figure 31. A
l'instant t1, la tension présente à
l'entrée atteint le seuil de basculement VT+,
la sortie passe très rapidement du niveau logique L
au niveau logique H, bien que le seuil VT+
soit franchi plusieurs fois au cours des oscillations présentes à l'entrée du
trigger. Au cours du front descendant, c'est à l'instant t2
que le signal d'entrée franchit le seuil de basculement VT-.
La sortie passe alors très rapidement du niveau logique H
au niveau logique L. Les
deux instants de basculement sont les deux instants où le signal franchit pour
la première fois le seuil considéré. Il est évident que plus la différence (VT+)
- (VT-) est importante, plus ce circuit sera fiable et insensible aux
fluctuations parasites superposées au signal originel. Cet écart de tension
entre les deux seuils est appelé hystérésis.
C'est une caractéristique propre à un trigger de Schmitt. Le cycle
d'hystérésis est représenté à la figure 32. Les
flèches sur ce schéma indiquent le sens de parcours des tensions à l'entrée
et à la sortie du trigger. Il apparaît clairement que la sortie
passe du niveau L au niveau
H dès que le seuil VT+ est
franchi à l'entrée de la bascule (flèche bleue). De même, il faut que la
tension d'entrée descende à VT- pour que
la sortie passe du niveau H au niveau L
(flèche rouge). La différence (VT+) -
(VT-) constitue également la «marge de bruit» qui est l'écart de
tension qu'un signal peut avoir sans entraîner d'incident particulier sur le
fonctionnement d'un circuit. La figure 33 présente l'allure d'un signal
présent à l'entrée d'une bascule de Schmitt. A
un moment donné, l'entrée a franchi le seuil VT+,
la sortie est donc au niveau H. On
aperçoit les perturbations du signal d'entrée, mais ce signal n'atteint jamais
le seuil VT-, donc l'entrée est
considérée en permanence à l'état H. Le
symbole suivant ()
indique qu'un circuit logique possède un cycle d'hystérésis. Des
exemples sont donnés à la figure 34.
2. 2. - RÉALISATIONS PRATIQUES DES TRIGGERS DE SCHMITT 2.
2. 1. - TRIGGER DE BASE Dans le trigger de la figure
35, deux résistances R1 et R2
sont associées à un buffer. Les
deux résistances sont montées en pont diviseur de tension. L'entrée du buffer
a une résistance très élevée, de l'ordre de quelques dizaines de M Dans ce cas, nous avons la relation
suivante : Appliquons
à l'entrée E le signal indiqué à la
figure 36. Au
départ, V1 = Vu = 0 volt. Au fur et à
mesure que V1 augmente, la tension d'entrée
du buffer Vo augmente aussi et Vu
reste nulle. En effet, il faut que Vo
atteigne Vcc / 2 pour que la sortie S
bascule au niveau H. La
tension V1 nécessaire au basculement du
buffer est la tension de seuil supérieur VT +. A
partir de la relation
précédente, exprimons cette tension V1 de
basculement. Juste avant le basculement, la tension Vo
est donc égale à Vcc / 2 et la tension de
sortie Vu est encore nulle. Remplaçons Vo
et Vu par leur valeur dans l'équation . La
tension V1 de basculement que l'on appelle VT+
est donc donnée par la relation . Si
l'on remplace dans le cas présent R1 et R2
par leur valeur et sachant que la tension d'alimentation est de 5
volts, on obtient une tension de basculement de : Ceci
est donc la valeur du seuil supérieur. Tant que la tension V1
restera supérieure à la tension de seuil inférieur VT-,
la sortie S restera au niveau H
(donc à la tension Vcc). Quand
la tension d'entrée V1 redescend, le buffer
bascule au niveau L pour Vo
= Vcc / 2. Calculons donc VT-
à l'aide de l'équation
en remplaçant Vo par Vcc
/ 2 et Vu par Vcc. d'où
: On
obtient la relation
: Remplaçons
R1, R2 et Vcc
par leur valeur numérique : Le
seuil inférieur est donc de 1,95 volt. L'hystérésis
vaut (VT+) - (VT-) = 3,05 - 1,95 = 1,1 volt. Il
serait par ailleurs possible d'augmenter la valeur de l'hystérésis en prenant
une valeur pour R1 supérieure à 22
k
2. 2. 2. - TRIGGER RÉALISÉ AVEC DES PORTES NAND
Ici, nous n'utilisons pas de résistances. Ce trigger est représenté à la figure 37. Il comprend trois portes NAND à trois entrées réalisées en technologie CMOS. Le fonctionnement de ce trigger utilise la propriété suivante : la tension du seuil de basculement est fonction du nombre d'entrées reliées ensemble sur lesquelles est appliqué le signal de commande. Ce seuil sera d'autant plus élevé qu'il y aura d'entrées reliées ensemble.
A l'état de repos, l'entrée E et la sortie S sont au niveau logique L. Quand la tension à l'entrée augmente et atteint VT+, la porte 1 commute, l'entrée SET passe au niveau L et la sortie S au niveau H.
Quand
la tension à l'entrée E redescend et
franchi le seuil VT-, la porte 3
commute et sa sortie passe au niveau H. La
sortie S commute également et repasse au
niveau L. Donc ce montage est bien un
trigger possédant deux seuils de basculement VT+
et VT-. L'hystérésis (VT+)
- (VT-) vaut environ 1 / 3 de Vcc
soit 1,66 volt pour Vcc
= 5 volts. Si l'on veut réduire l'hystérésis à 1
/ 6 de Vcc, il faut réunir
seulement deux entrées de la porte 1. Ceci
est indiqué à la figure 38. Ainsi,
le seuil VT+ est diminué. Ce
circuit particulier est souvent utilisé comme bascule de Schmitt disponible
sous forme de circuit intégré de la famille CMOS.
2. 3. - APPLICATIONS
DES BASCULES DE SCHMITT Les applications des bascules
de Schmitt sont nombreuses et quelques-unes ont déjà été traitées. C'est le
cas lorsqu'il s'agit de débarrasser certains signaux rectangulaires de
parasites ou d'améliorer des fronts montants ou descendants qui varient trop
lentement. Dans le chapitre 3, le trigger sera présenté dans un
montage astable. 2. 3. 1. -
TRANSFORMATION D'UNE SINUSOÏDE EN UN SIGNAL RECTANGULAIRE Le
montage est celui indiqué à la figure 39. A l'entrée est appliqué un signal
sinusoïdal de fréquence F. A la sortie, on
obtient un signal rectangulaire de fréquence identique F.
Les deux résistances R1 et R2
constituent un pont diviseur de tension et C
est un condensateur qui sert à découpler le signal d'entrée par rapport à
l'entrée du trigger de Schmitt. Si
l'on veut obtenir un signal carré à la sortie, on choisira de fixer une
tension V1 qui soit égale à (VT+)
- (VT-) / 2. Ceci apparaît clairement à la figure 40. Ce
montage peut servir à convertir une tension sinusoïdale produite par une
génératrice tachymétrique en un train d'ondes possédant une fréquence
proportionnelle à la vitesse de rotation de la génératrice. 2.
3. 2. - CIRCUIT ANTI-REBOND Dans le montage présenté
à la figure 41, il s'agit de délivrer une impulsion de tension sans que se
manifeste un phénomène de rebond à la fermeture du contact. A
la fermeture de l'interrupteur, il y a rebondissement des contacts, mais le
condensateur C limite les variations de
potentiel au point Vc et l'hystérésis du
trigger permet de conserver le niveau logique H
en sortie. 2.
3. 3. - DÉTECTEUR DE LUMIÈRE Le montage de la figure
42 permet de détecter un certain seuil de lumière pour commander, par exemple,
l'extinction d'une lampe. F
est une résistance photosensible dont la valeur diminue quand la lumière
augmente. Arrivé à un certain seuil d'éclairement, le point A
dépasse le seuil VT+ du trigger de Schmitt
et la sortie bascule au niveau logique L. Même
si l'intensité lumineuse subit de légères fluctuations, la sortie reste au
niveau L. Ce
montage fonctionne également dans le sens inverse. Quand l'intensité lumineuse
diminue, le point A franchit le potentiel VT-
et la sortie repasse au niveau H.